Le Vampire :
Mythes et Histoires
Les premières traces d’êtres buveurs de sang remontent à un dessin ornant un vase préhistorique découvert en Perse.
Dans la Grèce antique, les ombres du royaume d'Hadès sont décrites comme friandes du sang des victimes, tandis qu’en Crète (selon l’écrivain grecque Pausanias) on enfonçait dans la tête de certains morts un clou.
Sous l’Empire Romain, la loi Jus Pontificum indique que les corps ne doivent pas être abandonnés sans sépulture qui était protégée contre les voleurs et les ennemis.
Le Vampire est une des espèces les plus rares au monde, survivant depuis les temps les plus lointains, existant parmi les mortels, se nourrissant d'eux ou s'en servant pour perpétuer sa race.
Le Vampire est une entité spécifique, avec des traits et des caractéristiques précis, connus par les différentes cultures du monde, qui par leurs folklores et leurs traditions évoquent l'apparence du Vampire, ses activités ou ses pouvoirs. Si le Vampire est devenu par la littérature un être romantique, ses origines restent primitives et bestiales.
Le mot « Vampire » a des origines discutées, mais tous s'accordent à penser qu'il remonte aux langues slaves. Certains savants pensent que le mot a pu venir du lithuanien « wempti » (qui signifie boire) ou de la racine « pi » (c'est à dire boire) avec le préfixe « va » ou « av ». D'autres suggèrent que la racine du mot a inclus le turc « uber » (sorcière) et le serbo-croate « pirati » (souffler). Avec le temps, ces différentes racines ont donné « vampir » en serbo-croate, « apyr » en russe, « upior » en polonais et « upir » en Biélorusse.
D'autres auteurs préfèrent penser que « upir » est en fait plus ancien que « vampir », un nom slave oriental qui se serait diffusé à l'ouest dans les Balkans, où il aurait été repris et répandu par les slaves du sud.
Le mot « vampire » quant à lui serait parvenu dans la langue anglaise par deux publications de 1732 : la traduction d'un rapport officiel établi sur l'affaire Arnold Paole de Meduegna (célèbre cas de vampirisme qui a défrayé la chronique à l'époque) et un article de ‘The Craflsmn' du 20 mai 1732 nommé « Political Vampires » : Robert Walpole et ses amis whigs étaient assimilés à des Vampires.
Cette dimension politique n'a cessé d'être exploitée depuis lors, le vampirisme étant assimilé à une forme de pouvoir particulièrement abusive et odieuse qui peut être exercée par un gouvernement, une institution religieuse ou une caste sociale aux dépens du peuple.
Voltaire, dans son dictionnaire philosophique (1764), après avoir rappelé qu'à Londres et à Paris « Il y eut des agioteurs, des traiteurs, des gens d'affaires, qui sucèrent en plein jour le sang du peuple » ajoute avec malice que « les vrais vampires sont les moines qui mangent aux dépens des rois et des peuples ».
Victor Hugo a utilisé le terme de ‘Vampires' pour désigner les tyrans de toutes sortes, et au XXe Siècle, les bolcheviques puis les nazis et les staliniens qui régnaient par la terreur, sans oublier les capitalistes assoiffés de richesse, leur ont été souvent comparés : « Ces Vampires ne sucent évidemment pas le sang même si ils leur arrivent de le faire couler »
D'autres personnages qui eux non plus n'ont rien à voir avec la soif de sang ont été assimilés aux vampires : ce sont les vampires psychiques qui ont l'étrange faculté de régénérer leurs forces en absorbant à distance l'énergie vitale d'autrui.
Puis Jean Marigny rappelle l'attribution du nom d'abord aux chauve souris suceuse de sang par le naturaliste Buffon puis à certains types de maladie mentaux, comme les nécrophiles. Il écrit aussi « L'usage populaire donne volontiers le nom de vampires à tous les criminels qui se livrent, apparemment sans raison, à des actes de violence et de sadisme, même si ils ne font pas de fixation pathologique sur le sang » . Sans oublier le domaine des relations amoureuses, il conclut ainsi « Les termes ‘Vampiriser' et ‘Vampirisme' font partie à notre époque du vocabulaire de la conversation courante pour désigner toute forme de domination, de sujétion, et de harcèlement venant d'autrui »
Sont considérés comme vampires, des malades atteints de pathologie comme la nécrophilie, le nécrosadisme ou la nécrophagie ou de maladies comme l'hématophilie ou l'hématodypsie.
Il est également difficile de définir ce qu'est un vampire. Les définitions académiques font référence souvent à un fantôme suceur de sang ou à un cadavre réanimé, sortant de sa tombe la nuit pour s'abreuver du sang de personnes endormies. Elles ignorent les vampires psychiques ou astraux, ou les races particulières non-humaines.
La définition la plus pertinente serait celle d'une force ou d'un être parasite, malveillante et solitaire par nature, dont le désir est d'absorber la force vitale ou les fluides vitaux d'un organisme vivant pour satisfaire ses appétits ou perpétuer son existence surnaturelle.
Il y a autant de théories différentes sur le berceau des morts-vivants qu'il y a en a d'espèces.
De nombreuses régions ont la réputation d'être les foyers du vampirisme.
Des spécialistes de la question place l'Egypte comme leur lieu de naissance; d'autres pensent plutôt à l'Inde, la Chine, la Russie, la Mésopotamie et, bien sûr, la Roumanie (ou Transylvanie). Le choix de la Transylvanie doit beaucoup au succès mondial du Dracula de Bram Stocker.
Les suceurs de sang, divins ou non, furent une part intégrale des anciens cultes et des éléments clés dans les religions naissantes et dans les panthéons des anciennes ou nouvelles civilisations, ou la permission divine, le sang et la terre qui donne la vie et la nourriture étaient inextricablement liés.
Le concept de vampire qui a survécu à travers les époques doit sans doute à ce lien entre la nature et la terre. Ainsi, le vampire émerge du sol et souvent est limité par les forces naturelles (le soleil, l'eau et le feu) mais il peut aussi contrôler une partie de la nature (pluie, vent, brouillard et les animaux).
Pendant des siècles, le vampire a dominé les superstitions et les craintes des paysans, si bien que l'Eglise et les lettrés se sont réfugiés dans la pseudoscience de leur époque, enchaînés par le carcan rigide de leur dogme et les croyances populaires
La découverte du vampire comme un modèle de création artistique par les membres du mouvement romantique a permis au mort-vivant de dépasser les limites de son environnement rural et primitif. Toujours porteurs de peurs liées à la mort, au sang et à la tombe, le vampire a commencé à avoir une fonction dans le monde social, intellectuel et voire politique. Il s'est montré remarquablement adaptable aux demandes des nouvelles générations, pour tous ceux qui voyaient en lui quelque chose de fort, de séduisant et de désirable.
Si dans un premier temps le vampire fut la représentation physique des activités sataniques dans le monde, aujourd'hui, il est le reflet des préoccupations morbides de notre société.
Le mort-vivant sert de métaphore culturelle à l'immortalité trompeuse et la victoire de la vie sur la mort.
Le vampire est l'être qui a conquis la mort, qui a contourné les règles de la mortalité quotidienne et qui est parvenu à une place aux frontières de la société. Pour ses actions il n'a aucune limite morale et il n'a aucun remord. Il est sensuel, irrésistible et immunisé aux terrifiants aspects de la société moderne: violence, drogue, maladie, famine et chaos social. Etre un vampire signifie être membre d'une race d'élite..
Le Vampire trouve son origine dans de nombreuses traditions antiques:
les Romains croyaient dans le retour des morts (la Lemuria)
et les Grecs dans la fête des morts (la Anthesteria).
En Albanie, par exemple, on trouve la trace dans les traditions de nombreuses espèces: le Vrykolakas(Vurkolaka) existant également en Grèce et proche de la race grecque; le Sampiro est un dérivé du vampire slave; un moins connu est le Kukuthi (ou Lugat).
Selon les croyances albanaise, quiconque tué par un vampire est irrémédiablement condamné à sortir de sa tombe. La destruction de tels êtres est possible par la méthode classique du pieu dans le cœur et couper en morceaux est également considéré comme utile contre des Kukuthi. Il y a, il est vrai, une tradition qui veut que le coupable de crime non puni dans sa vie est condamné à sa mort à devenir vampire.
Les Arabes possèdent leurs vampires, leur Jinn suceur de sang: l'Algul, démon à forme variable, souvent sous l'apparence d'une femme démon qui vit de nourrisson mort et dans les cimetières inhabités. L'Algul est surtout connu comme une Goule.
On doit beaucoup aux travaux de Leo Allatius, écrivain de XVIIe siècle, qui a compilé des informations sur les espèces grecques (les Vrykolakas) dans son recueil sur les superstitions grecques, De Quorundum Graecorum Opinatibus, publié à Cologne en 1645. Insistant particulièrement sue ces morts-vivants, Allatius a préservé les détails sur les Vrykolakas et les Nonocanons (ordonnance de l'Eglise orthodoxe grecque) contre le vampirisme et les vampires. Selon lui, le Vrykolakas était « le corps d'un homme mauvais à la vie particulièrement immorale (souvent excommunié par son évêque), corps à l'intérieur duquel le démon entrait et le faisant sortir de la tombe, le faisait errer dans la nuit, frappant aux portes et appellent ses habitants. Si l'un répondait, il mourait le jour suivant. Un Vrykolakas n'appellent jamais deux fois, les habitants de l'Ile Chios assuraient leur survie en attendant un autre appel avant de répliquer.
L'un des premiers récits de vampire remonte à Apollonius de Tyana, philosophe et sophiste du Ie siècle, dont la vie fut écrite par Philostratus.
Dans la Vie de Apollonius de Tyana, livre IV, un des pupilles d'Appolonius, Menippus, est sauvé d'une mort certaine des mains d'une femelle vampire, de la race des Empusa.
On peut également citer l'histoire du Vampire du Château Alnwick, qui terrorisa la ville d'Alnwick et ses environs en Angleterre, dans le Nothumberland. Ses exactions et ses brutalités ont été décrites par le chroniqueur du XIIe siècle William de Newburgh.
Le vampire en question était, dans sa vie, un homme cruel et pervers, qui avait eu les faveurs du seigneur local. Une nuit, alors qu'il espionnait la femme de celui-ci en plein adultère, il trébucha de son poste et mourut en s'écrasant au sol.
Bien qu'ayant reçu les derniers sacrements chrétiens, il réapparut bientôt et commença à attaquer les villageois, répandant la peste. La population se vidait au fur et à mesure que les victimes se multipliaient. Un groupe de survivants courageux, finalement, alla au cimetière, commença à creuser et trouva le vampire dans sa tombe. Ils embrochèrent le corps gorgé de sang, voyant avec horreur du sang s'écouler en abondance. Le corps fut brûlé et les épidémies et les morts cessèrent immédiatement. C'est un excellent exemple de peste ou d'épidémies attribuées à un revenant.
L'Allemagne connaît l'Alp, une sorte d'esprit vampire souvent associé à l'Incubus, tourmentant les nuits et les rêves de femmes, mais aussi des hommes et des enfants. La manifestation physique de l'Alp peut être très dangereuse. Lié aux cauchemars, l'Alp est considéré comme un homme, quelquefois l'esprit de quelqu'un mort récemment, le plus souvent un démon. Pendant le Moyen age, on vit l'Alp apparaître sous la forme d'un chat, un porc, un oiseau ou un autre animal, notamment un chien démoniaque et lubrique assez proche du loup-garou. Dans toutes ses manifestations, il était connu pour porter une sorte de chapeau. Cet esprit pouvait voler comme un oiseau, galoper comme un cheval et crédité d'une certaine galanterie. Il entrait dans la bouche de ses victimes, l'Alp utilisant sa langue soit comme une brume soit comme un serpent. Amateur de relations sexuelles dites terribles, il suçait le sang de ses victimes en leur dévorant le sein. Parce qu'il provoque la terreur dans les esprits et le sommeil, l'Alp est quasi-indestructible, sauf à le débarrasser de son chapeau, qui lui confère son pouvoir.
Aluga, ou Aluka est le nom d'un vampire ou d'un démon suceur de sang, inspiré de la Bible (P. 30:15), proche de l'Algul arabe, et considère comme le prince démon des vampires.
Les premiers Indiens avaient leurs propres croyances concernant le retour d'esprits morts, fantômes ou revenants. Ainsi, les Indiens Ojibwa acceptaient l'idée d'une résurrection, où l'âme ne pouvait pas entrer dans l'Au Delà et revenait dans son corps, le ramenant à la vie. Des races spécifiques de vampires ont existé, comme le Mangeur d'hommes des Ojibwa ou le Mangeur de Vies des Cherokee. Le plus répugnant des vampires indiens était une créature avec une bouche tentacule, qui suçait le cerveau de ses victimes à travers leurs oreilles.
Les Mayas possédaient une culture moins sanguinaire que les autres civilisations précolombiennes, mais vénéraient un dieu effrayant à forme de chauve souris, dont l'influence dépassa l'Amérique Centrale. Connu des Mayas sous le nom de Zotzilaha et les peintures représentant ce dieu existent dans des temples et des cités à travers le royaume Maya. Il était sous la forme d'un grand homme, à tête et ailes de chauve-souris, son visage et ses dents étant celles d'une chauve-souris vampire. Dans une main il tenait une tête coupée et dans l'autre un cœur, symbolisant sa puissance sur les vivants et le don de l'ultime sacrifice à lui faire, la vie. Zotzilaha fut plus tard adopté par les Aztèques, qui incorporèrent nombre de ses attributs à leurs divinités, Huitzilopochtli, un dieu plus exigeant que celui des Mayas.
Le Mexique possède comme nation une riche tradition vampire dans son folklore.
Chez les Aztèques, une idée profondément ancrée voulait que la survie du monde dépendait des offrandes de sacrifices humains, où chaque cœur des victimes était extrait et offert au puissant dieu soleil. Ces rituels sans limites ont identifié les Aztèques comme brutaux, impérialistes et fascinés par le sang et la mort. Dans leur contexte, ces sacrifices étaient essentiels, comme l'étaient les activités des prêtres de Tlaloc, le dieu de la pluie, à qui l'on offrait des enfants, croyant, plus importants étaient leurs pleurs sous la torture, davantage généreux serait le dieu pour faire tomber la pluie. Ces prêtres étaient reconnaissables à leurs tenues et leurs cheveux recouverts de sang. A côté de ces prêtres se tenaient les Nahualli, les magiciens craints et les Tlaciques, des sorcières. Avec la fin brutale de l'empire Aztèque en 1521 par les Espagnols, le folklore européen fut accepté et combiné aux coutumes locales.